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Nous transformons ce qu’être une femme écogarde signifieComment les femmes du Kenya s’impliquent dans la conservation
Comment les femmes du Kenya s’impliquent dans la conservation
En 2019, un évènement décisif pour l’égalité des sexes en matière de leadership dans la conservation de la faune et la gestion au Kenya est passé largement inaperçu : Nancy Kabete a été nommée Directrice adjointe en charge de la sécurité de la faune du Kenya Wildlife Service (KWS).

Ce fut une nomination excitante, quoique surprenante. Pour la première fois depuis 1946, date de la création du premier parc national du pays, la lourde tâche de protéger la flore et la faune sauvages du Kenya sur terre et en mer (notamment les éléphants et les rhinocéros noirs, menacés d’extinction), et de diriger plus de 1 500 écogardes armés, repose entre les mains d’une femme.
Un historique d’inégalité
Cette avancée était impensable il y a 30 ans, lorsque la Quatrième conférence mondiale sur les femmes des Nations unies s’est tenue à Pékin, en Chine. À l’époque, cette femme officier de terrain du KWS, très respectée et compétente, était basée au parc national du lac Nakuru en charge de l’éducation et de la sensibilisation des enfants à la vie sauvage.
A contrario, trois de ses camarades de classe masculins protégeaient la faune en première ligne. Diriger des bureaux sensibles de protection de la faune pendant les guerres de braconnage de la fin des années 80 et du début des années 90 les a exposés à une visibilité et à des responsabilités au niveau national, à une formation internationale et à des réseaux professionnels à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Ils sont montés en grade rapidement.
La situation de leur collègue, cloîtrée dans un petit bureau de l’éducation, est enracinée dans une longue histoire de patriarcat au sein des forces armées kenyanes.
Tandis que ses pairs montaient en grade, la directrice de l’éducation, tout aussi compétente, se voyait obligée de plaider à maintes reprises pour des promotions et des mutations dans des postes où son ancienneté et ses capacités pouvaient être mieux exploitées. Un autre devoir, plus impérieux, s’imposait : elle était une épouse, une mère et une femme au foyer.
Les difficultés à recruter des femmes écogardes
James Isiche, Directeur d’IFAW Afrique, alors jeune officier en poste au parc national d’Aberdare, se souvient que même si feu le directeur Richard Leakey avait résolument entrepris de recruter davantage de femmes pour les postes de terrain, la rude réalité de la gestion de la faune sauvage rendait leur intégration et leur progression de carrière extrêmement difficiles.

« Il n’était pas possible, par exemple, de déployer une jeune femme officier ou écogarde dans un avant-poste isolé et sauvage, avec des logements rudimentaires et collectifs, où elle serait la seule femme parmi les hommes, explique James Isiche. Les femmes ont des besoins qui leur sont propres. Elles ont besoin d’intimité et de sécurité. Elles peuvent être mères.
Leur affectation était donc limitée à une poignée d’espaces urbains sûrs où des services publics comme le logement, les infrastructures de santé et la scolarisation des enfants étaient accessibles, ce qui a considérablement freiné leur intégration et l’évolution de leur carrière. »
Eva Komba, experte des questions de genre et de développement, affirme que si la conservation de la faune était dominée par les hommes en partie à cause de l’environnement hostile des parcs nationaux éloignés, cela était également favorisé par le patriarcat et l’absence de politiques d’intégration sur le lieu de travail.
« Attribuer aux femmes des missions « douces » comme l’éducation était à la fois une présomption et un stéréotype, explique Eva Komba, qui est également membre du conseil d’administration de la Pastoralist Child Foundation. Heureusement, les attitudes et les mentalités évoluent, les politiques modifient les pratiques et les efforts de plaidoyer poussent les femmes à remettre en question les mythes et les stéréotypes. Les jeunes femmes dans le domaine de la conservation ont désormais des modèles forts. Il s’agit de barrières à surmonter. »
Un avenir dans la conservation pour les femmes
Cet état d’esprit semble avoir émergé après la Conférence des femmes de Pékin, un événement sans précédent qui visait à éliminer les discriminations, à lutter contre les inégalités et à renforcer l’autonomie des femmes.

Quand Nancy Kabete a été nommée Directrice adjointe du KWS, chargée de la sécurité des espèces sauvages, 24 ans après la conférence historique, elle se tenait en effet sur des épaules de géantes. L’une d’entre elles est la brillante Ann Kahihia, officier devenue la première femme écogarde à diriger l’un des six grands parcs nationaux kenyans. Elle est devenue Directrice assistante régionale, supervisant un écosystème s’étendant sur plusieurs parcs animaliers.
À ce moment-là, l’égalité entre les hommes et les femmes était devenue la norme et les femmes bénéficiaient d’un quota déterminé lors du recrutement des écogardes et des élèves-officiers. Ces dernières années, certains gouvernements ont également amélioré les infrastructures publiques dans les zones marginalisées, ce qui permet aux femmes officiers de servir plus facilement. Selon Eva Komba, il s’agit d’une grande victoire pour la conservation.
« Les femmes dirigeantes contribuent de manière significative à la conservation, car elles sont souvent capables de nouer des relations et d’instaurer la confiance avec les communautés voisines des parcs nationaux, explique-t-elle. Elles savent communiquer et sensibiliser le public en mobilisant le soutien en faveur des initiatives de conservation ».
Si l’égalité des sexes, telle qu’elle est inscrite dans la constitution kenyane de 2010, reste difficile à atteindre (seules 150 femmes écogardes ont été recrutées au KWS en 2024, contre 1 350 hommes), aller du centre de formation à la direction de la conservation n’est plus un exploit impossible pour les femmes officiers.
Comment IFAW soutient les écogardes
IFAW mobilise des sympathisants du monde entier pour améliorer le logement et le bien-être des écogardes dans les parcs animaliers et les réserves de faune sauvage appartenant aux communautés locales en Afrique. Nous soutenons également le rôle des femmes dans la conservation et au sein des écogardes, notamment au travers de l’équipe des Lionnes, l’une des premières unités d’écogardes exclusivement féminines au Kenya
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