Sheryl Fink
l’année 2020 pourrait-elle signer la fin de la chasse commerciale aux phoques au Canada ?
l’année 2020 pourrait-elle signer la fin de la chasse commerciale aux phoques au Canada ?
Pour la plupart d’entre nous, 2020 n’a pas vraiment commencé de manière très encourageante. En réalité, il s’agira probablement de l’une des années les plus difficiles de notre histoire commune. Et au milieu d’une pandémie mondiale et des bouleversements économiques massifs qui en découlent, j’ai été surprise, je l’admets, que tant de nos sympathisants prennent le temps de nous contacter et de nous demander « Et les phoques du Canada ? »
Ayant travaillé pendant plus de 22 ans sur la campagne fondatrice d’IFAW pour mettre fin à la chasse commerciale des phoques au Canada, il est réconfortant de savoir que vous êtes toujours aussi nombreux à vous intéresser avec passion à cette question. Merci. Non seulement cette question était au cœur de la création d’IFAW il y a plus de cinquante ans, mais elle continue de recevoir le soutien collectif de tant de personnes qui se sont engagées à mettre fin à cette pratique brutale.
La chasse annuelle des phoques du Groenland au Canada, avec un quota de 400 000 individus, a longtemps été le plus grand massacre de mammifères marins sur terre. Ce n’est en aucun cas une distinction à la hauteur de la culture progressiste du Canada. Chaque printemps, en tant qu’organisation engagée sur cette question depuis maintenant cinq décennies, nous sommes confrontés aux mêmes questions :
- Le gouvernement canadien encouragera-t-il la poursuite de la chasse, même si les marchés mondiaux des produits dérivés du phoque ont disparu ? Va-t-il accorder des subventions financières comme encouragement supplémentaire ?
- Les responsables politiques écouteront-ils les preuves scientifiques démontrant que les phoques du Groenland n’ont pas d’impact négatif sur les stocks de poissons ? Ou bien vont-ils céder aux demandes largement intéressées des pêcheurs qui souhaitent la mort des phoques ?
- Y aura-t-il assez de glace pour que les mères phoques puissent mettre bas et allaiter leurs petits ? Ou bien la menace persistante du changement climatique va-t-elle encore entraîner la famine ou la noyade de dizaines de milliers de petits ?
- Et peut-être plus important encore, à quel moment tout le monde (tant les gouvernements que l’écrasante majorité de la population) va dire : « Ça suffit ! La chasse aux phoques appartient au passé du Canada, mais elle n’est plus nécessaire ni souhaitable pour l’avenir du Canada. »
Mais heureusement, cette année a été différente. Juste au moment où les mères phoques étaient sur le point de mettre bas, la COVID-19 est arrivée, affectant la population mondiale d’une manière sans précédent dans l’histoire récente. Lorsque le virus a commencé à se propager au Canada, les entreprises ont été fermées et des restrictions ont été mises en place pour ralentir la propagation. Deux usines de traitement des phoques à Terre-Neuve ont été fermées, pour une durée indéterminée. Les ateliers de formation pour la chasse commerciale aux phoques ont été reportés, puis finalement annulés. L’ouverture de plusieurs pêcheries, y compris celles qui participent à la chasse aux phoques, a été retardée. Ce retard, cependant, s’est avéré être une aubaine pour des dizaines de milliers de phoques nouveau-nés. En effet, bien que la chasse commerciale aux phoques à Terre-Neuve n’ait pas encore officiellement « ouvert », elle est maintenant pratiquement terminée. À présent, les phoques du Groenland ont commencé leur migration vers le nord, vers leurs aires d’alimentation estivales dans l’Arctique, hors de portée des chasseurs de la côte est du Canada. Cette année, ils seront en sécurité.
Selon les chiffres préliminaires de Pêches et Océans Canada, la chasse commerciale aux phoques dans la région en 2020 sera de loin la plus faible jamais enregistrée. À ce jour, seulement 390 phoques ont été tués à Terre-Neuve-et-Labrador, la province qui concentre la majorité de la chasse. En comparaison avec les 32 073 tués dans la même région l’année dernière et les 82 740 tués en 2017, cela représente une énorme diminution. Selon les représentants du gouvernement, un nombre « minime » de phoques ont effectivement été tués dans d’autres régions du Canada, mais les chiffres sont si faibles qu’ils ne peuvent être divulgués en vertu des lois fédérales sur la protection de la vie privée.
Ces chiffres me donnent de l’espoir, et surtout, ils donnent aux phoques une chance de vivre.
Soyons clairs. La chasse commerciale aux phoques au Canada est en déclin depuis 2009. Pendant des décennies, IFAW a travaillé sans relâche pour mettre fin à cette chasse en rassemblant des preuves vidéo de première main, en plaidant pour la fermeture des marchés internationaux des produits dérivés du phoque et en faisant pression sur le gouvernement canadien pour qu’il mette fin au soutien financier qu’il apporte à ce secteur. Il s’agit d’une stratégie globale, constante, et nous ne cesserons pas tant que la chasse ne sera pas définitivement terminée.
Alors, que fait-on maintenant ?
Alors que nous reconstruisons notre économie après la Covid-19 et que nous atteignons une sorte de nouvelle normalité, nous avons la chance de modifier notre relation avec la nature qui inclut, en grande partie, nos océans et sa faune riche. Nous devons saisir cette chance unique.
Nous continuerons de faire pression sur le gouvernement du Canada pour qu’il cesse de soutenir la chasse commerciale aux phoques et, à sa place, nous encouragerons le soutien d’initiatives durables et non cruelles qui profitent à la fois à nos océans et aux communautés qui en dépendent. Le Canada a consacré 25 ans et des centaines de millions de dollars dans un effort malavisé pour relancer le secteur de la chasse commerciale aux phoques qui est non seulement cruel, mais aussi inutile et contraire aux principes d’une nation progressiste. L’expérience de la chasse aux phoques a échoué, et il serait insensé de reprendre cette voie. À notre époque, cette pratique, qui constitue un tel gaspillage écologique et qui profite à si peu de gens, n’est tout simplement pas nécessaire.
Ce dont nous avons besoin, c’est d’un plus grand soutien aux initiatives qui restaurent et réhabilitent nos écosystèmes océaniques, plutôt que de les démanteler davantage. Par exemple, notre énergie collective devrait se concentrer sur la réduction des impacts dévastateurs qui sont le résultat des dispositifs de pêche perdus et abandonnés (aussi appelés « engins fantômes ») et des plastiques à usage unique qui sont si préjudiciables à la vie marine. Ces filets, lignes de pêche et plastiques jetés enchevêtrent et noient d’innombrables poissons, oiseaux, mammifères marins ainsi que d’autres formes de vie chaque année. La situation ne fera qu’empirer tant que nous ne forcerons pas un changement collectif.
Cette année a prouvé magistralement que le Canada n’a pas besoin de la chasse commerciale aux phoques. Nos écosystèmes, notre économie et notre image internationale en bénéficieront et se développeront sans une telle chasse. On nous a donné l’occasion d’opérer un changement radical. Adoptons maintenant de nouvelles solutions, des approches novatrices et une approche différente du monde naturel.
Sheryl Fink, Directrice Campagnes IFAW au Canada
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