la Commission européenne doit empêcher la France et l’Espagne de tuer des milliers de dauphins
la Commission européenne doit empêcher la France et l’Espagne de tuer des milliers de dauphins
29 octobre 2020
Bruxelles, 29 octobre 2020 – Pour les ONG, des milliers de dauphins communs du golfe de Gascogne risquent de mourir cet hiver dans les filets de pêche si la Commission européenne n’intervient pas en prenant des mesures d’urgence pour réduire les prises accessoires, qui sont aujourd’hui la principale cause de mortalité et de blessures chez ces dauphins. Malgré les exigences réglementaires visant à protéger cette espèce et les recommandations scientifiques [1] préconisant la fermeture des pêcheries responsables des captures dans cette zone, la France et l’Espagne refusent d’agir [2].
Faute d’action efficace de la part de la France et de l’Espagne, les organisations Seas At Risk, Whale and Dolphin Conservation, France Nature Environnement, le Fonds international pour la protection des animaux, ClientEarth, WWF, Ecologistas en Acción et Sea Shepherd France demandent à la Commission européenne de suivre les recommandations scientifiques qu’elle a demandées et de fermer d’urgence les pêcheries responsables de la capture et de la mort accidentelles de milliers de dauphins dans le golfe de Gascogne chaque hiver. La fermeture temporaire des pêcheries, du 1er décembre 2020 au 31 mars 2021, permettrait d’éviter la mort inutile de ces animaux marins emblématiques et protégés.
« C’est une course contre la montre. Si nous n’agissons pas maintenant, des milliers de dauphins protégés seront tués dans les filets de pêche au cours des mois à venir. Une fois de plus... Il n’y a que la fermeture temporaire des pêcheries responsables des prises accessoires pour empêcher une nouvelle saison de morts de masse inutiles et indésirables, explique Andrea Ripol, Responsable des politiques en matière de pêche chez Seas At Risk. Elle ajoute : Plus tôt dans l’année, la Commission s’est engagée à prendre des mesures d’urgence si nécessaire [3]. C’est maintenant qu’il faut agir. »
Pour Sarah Dolman, Whale and Dolphin Conservation : « La Commission européenne doit adopter immédiatement des mesures d’urgence à court terme pour empêcher la mort des dauphins. En parallèle, elle doit donner à la France, à l’Espagne et aux autres nations qui pêchent dans le golfe de Gascogne et ses environs le temps d’élaborer des mesures efficaces sur le long terme pour lutter contre les prises accessoires de dauphins communs protégés. »
Selon Sophie Mjati, France Nature Environnement : « Après avoir d’abord annoncé qu’elle fermerait les pêcheries responsables des prises accessoires de dauphins communs dans le golfe de Gascogne pendant six semaines cet hiver (lors de la réunion du groupe de travail national sur les prises accessoires en juillet 2020), la France a maintenant décidé de ne pas fermer les pêcheries du tout, en invoquant un manque de données scientifiques. En réalité, cela va à l’encontre de l’avis du CIEM et des dizaines d’années de travail de l’Observatoire Pelagis sur ce sujet. La société civile exhorte aujourd’hui la Commission européenne à prendre des mesures d’urgence et à fermer les pêcheries, la France n’étant pas capable de respecter sa propre législation ou les conventions communautaires et internationales. »
« Il est invraisemblable de devoir demander, après le discours du Commissaire du début de l’année et l’engagement pris, l’adoption de ces mesures importantes. Nous craignons que les engagements pris dans le cadre de la stratégie sur la biodiversité soient loin de se traduire par des actions concrètes, ajoute Eleonora Panella, Chargée de campagne principale chez IFAW. »
John Condon, avocat Faune et Habitat chez ClientEarth a déclaré : « La France et l’Espagne font déjà l’objet de poursuites judiciaires initiées par la Commission en raison de leur incapacité à empêcher les prises accessoires. Pour éviter que cette violation ne s’aggrave, la Commission doit agir de toute urgence pour protéger les dauphins communs dans le golfe de Gascogne. »
Pour le Dr Antonia Leroy, Directrice des politiques Vie des océans, Bureau des politiques européennes du WWF : « Malgré la procédure d’infraction lancée par la Commission européenne l’été dernier, la France et l’Espagne n’ont pas fourni de mesures d’atténuation adéquates pour faire face à la crise des prises accessoires de dauphins dans le golfe de Gascogne. Il est temps que la Commission européenne impose des mesures d’urgence, notamment la fermeture de la pêche cet hiver, car c’est l’une des principales menaces qui pèsent sur les mammifères marins et cela conduit déjà certains d’entre eux au bord de l’extinction. »
« La France ne peut pas prétendre que les dauphins sont une espèce protégée et pourtant continuer à autoriser des centaines de bateaux de pêche avec des méthodes non sélectives à pêcher sur le territoire de ces animaux. Nous avons besoin de toute urgence d’un secteur de la pêche plus respectueux de l’océan et plus transparent sur ce qui se passe en mer. Ce n’est pas du tout au programme pour le moment, explique Lamya Essemlali, Présidente de Sea Shepherd France. »
Selon Ana Aldarias, Coordinatrice des questions marines chez Ecologistas en Acción : « L’Espagne n’intervient que très lentement pour mettre fin à la capture accidentelle de cétacés dans le golfe de Gascogne, au lieu de prendre rapidement les mesures nécessaires pour sauver les dauphins. Compte tenu du manque d’action significative de l’Espagne à ce jour, nous exhortons la Commission européenne à mettre en place des mesures d’urgence qui donneront à l’Espagne le temps de se coordonner avec la France pour mettre en œuvre des mesures ambitieuses à moyen et long terme. Cela devrait être la première étape d’un plan global visant à mettre fin aux prises accessoires de toutes les espèces dans les pêcheries espagnoles. »
Les scientifiques estiment que plus de 10 000 dauphins communs sont tués dans le golfe de Gascogne chaque année en raison des activités de pêche nuisibles, le pic de mortalité et d’échouage se situant entre décembre et mars.
Comme les autres cétacés, les dauphins sont strictement protégés dans les eaux de l’UE [4]. Les États membres sont tenus de réduire au minimum et, si possible, d’éliminer les captures accidentelles d’espèces non ciblées par leurs pêcheries [5]. Les mesures mises en œuvre à ce jour par les flottes française et espagnole dans le golfe de Gascogne sont terriblement insuffisantes. La Commission a déjà reconnu le problème et a récemment engagé des poursuites judiciaires contre les États membres pour ne pas avoir mis en œuvre les lois visant à protéger les dauphins des prises accessoires [6]. À la suite de cela, la Commission a demandé aux États membres de soumettre des recommandations communes pour résoudre efficacement le problème des prises accidentelles par les pêcheries. Ce processus est toutefois trop lent et les mesures proposées à ce jour sont inadéquates, sans compter que la France a refusé de fermer ses pêcheries cet hiver [7]. Suite à l’appel des ONG pour la fermeture immédiate et temporaire de ces pêcheries, la mise en œuvre de la surveillance électronique à distance (REM) est urgente pour l’ensemble de la flotte de pêche de l’UE. Cette technologie de surveillance des activités de pêche est conforme à l’avis scientifique émis par le Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM), qui a reconnu que les prises accessoires constituent la principale menace pour cette population de dauphins et a également recommandé la fermeture hivernale des pêcheries responsables de prises accessoires dans le golfe de Gascogne. L’avis du CIEM fait suite à une plainte de 26 ONG [8] auprès de la Commission européenne, lui demandant d’engager une procédure d’infraction contre la France et les 14 autres gouvernements européens pour manquement à leur obligation de protéger les cétacés des activités de pêche nuisibles. Des centaines de scientifiques et de spécialistes de la conservation ont appelé à une action mondiale pour protéger les dauphins et les autres cétacés de l’extinction [9], soulignant l’ampleur de la menace que représentent les filets de pêche pour les cétacés. Cela signifie que tout retard supplémentaire est purement inacceptable.
Seas At Risk est une organisation qui regroupe des ONG environnementales de toute l’Europe et qui promeut des politiques ambitieuses aux niveaux européen et international pour la protection et la restauration du milieu marin.
ClientEarth est une organisation caritative qui utilise des moyens juridiques pour protéger les personnes et la planète. Nous sommes des juristes internationaux qui trouvent des solutions pratiques aux plus grands défis environnementaux du monde. Nous luttons contre le changement climatique, protégeons les océans et la faune, renforçons la gouvernance forestière, favorisons une énergie verte, responsabilisons les entreprises et faisons pression pour la transparence des gouvernements. Nous sommes convaincus que le droit est un instrument propice à un changement positif. Depuis nos bureaux de Londres, Bruxelles, Varsovie, Berlin et Pékin, nous travaillons sur la législation à tous les stades de sa vie, depuis les premières étapes jusqu’à sa mise en œuvre. Et lorsque ces législations sont transgressées, nous allons devant les tribunaux pour les faire appliquer.
FNE a été créé en 1968 et rassemble plus de 3 500 ONG locales réparties dans toute la France, y compris dans les territoires d’outre-mer, qui œuvrent dans divers domaines environnementaux (océans, énergies, forêts, agriculture, santé, éducation, transports, déchets, etc.). L’objectif de FNE est donc de faire entendre la voix de la société civile et de protéger l’environnement terrestre et marin. FNE intervient aux niveaux local, régional, national et européen.
Le Fonds international pour la protection des animaux est une organisation mondiale à but non lucratif qui aide les animaux et les hommes à cohabiter ensemble. Nous réunissons tant des experts que des citoyens, travaillant par-delà les mers et les océans et dans plus de 40 pays du monde. Nous sauvons, soignons et relâchons les animaux, et nous restaurons et protégeons leurs habitats naturels.
WDC, Whale and Dolphin Conservation est la principale organisation caritative qui se consacre à la protection des baleines, des dauphins et des marsouins. Nous travaillons à l’échelle mondiale par le biais de campagnes, de lobbying, de conseils aux gouvernements, de projets de conservation, de recherches sur le terrain, de sauvetage, de sensibilisation et de mobilisation pour faire avancer notre vision d’un monde où chaque baleine et chaque dauphin est libre et en sécurité.
WWF est une organisation de conservation indépendante, avec plus de 30 millions de soutiens et un réseau mondial actif dans près de 100 pays. Sa mission est de mettre un terme à la dégradation de l’environnement naturel de la Terre et de construire un futur dans lequel les humains vivent en harmonie avec la nature en conservant la diversité biologique mondiale, en assurant une utilisation durable des ressources naturelles renouvelables et en luttant pour la réduction de la pollution et du gaspillage.
Ecologistas en Acción est une confédération de plus de 300 groupes environnementaux répartis dans les différentes villes d’Espagne. Elle participe à ce qu’on appelle l’écologisme social, qui comprend que les problèmes environnementaux ont leur origine dans un modèle de production et de consommation de plus en plus mondialisé, dont découlent également d’autres problèmes sociaux, et qu’il faut transformer si l’on veut éviter une crise écologique. C’est pourquoi nous travaillons à tous les niveaux, du local à l’international.
Sea Shepherd France est une organisation de conservation marine à but non lucratif qui s’engage dans des campagnes d’action directe pour défendre la faune sauvage et pour conserver et protéger les océans du monde contre l’exploitation illégale et la destruction de l’environnement. Depuis le début, Sea Shepherd France a utilisé des tactiques innovantes d’action directe pour défendre, conserver et protéger la biodiversité délicatement équilibrée de nos océans et faire respecter les lois internationales en matière de conservation.
Notes :
[1] « Demande de l'UE relative à des mesures d'urgence visant à prévenir les prises accessoires de dauphins communs (Delphinus delphis) et de marsouins communs de la Baltique (Phocoena phocoena) dans l'Atlantique Nord-Est », demande spéciale de conseils au CIEM pour les écorégions de l'Atlantique Nord-Est, publié le 26 mai 2020 (en anglais)
[3]Le 26 juin 2020, lors de la table ronde sur les captures de cétacés dans les filets de pêche, organisée par la Commission européenne, le commissaire européen Virginijus Sinkevičius a déclaré : « En l’absence d’actions suffisantes de la part des États membres dans ces régions, la Commission devra intervenir » et que « la Commission devra agir si le processus de régionalisation ne donne pas de résultats rapides. »
[4] L’espèce des dauphins communs est strictement protégée en vertu de la directive Habitats (Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages) https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:31992L0043
[5] Règlement (UE) 2019/1241 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relatif à la conservation des ressources halieutiques et à la protection des écosystèmes marins par des mesures techniques ; et Règlement (UE) 1380/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 relatif à la politique commune de la pêche
[6] Environnement et pêche : la Commission demande instamment à la FRANCE, à l’ESPAGNE et à la SUÈDE de prendre des mesures pour réduire les prises accessoires https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/inf_20_1212
[7] La France ne parvient pas à empêcher la mort de milliers de dauphins, au mépris de la loi et la science https://seas-at-risk.org/16-fisheries/1106-france-fails-to-prevent-thousands-of-dolphin-deaths-challenging-law-and-science.html
[8] Seas at Risk, Whale and Dolphin Conservation, ClientEarth, Coalition Clean Baltic, Coastwatch Europe, Danish Society for Nature Conservation, Ecologistas en Acción, The Fisheries Secretariat, Fundació ENT, France Nature Environnement, Humane Society International, Fonds international pour la protection des animaux, Irish Wildlife Trust, Irish Whale and Dolphin Group, Ligue pour la Protection des Oiseaux, Marine Conservation Society, Natuurpunt, Oceana, OceanCare, Our Fish, Sciaena, Sea Shepherd France, Sustainable Water Network SWAN, Swedish Society for Nature Conservation, sous-groupes de Wildlife and Countryside Link Bycatch, WWF.
[9] Risque d’extinction « réel et imminent » des baleines, BBC https://www.bbc.com/news/science-environment-54485407 (en anglais)
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