Qu’est-ce que les captures accessoires en mer ?
Qu’est-ce que les captures accessoires en mer ?
16 août 2024
Chaque année, des millions d’animaux marins sont victimes de captures non-intentionnelles, à savoir la capture involontaire de poissons et d’organismes marins non ciblés dans les dispositifs de pêche commerciale. La pratique consistant à capturer et à rejeter des animaux marins de cette manière menace non seulement la survie de ces espèces, mais perturbe également l’équilibre délicat des écosystèmes.
Dans cet article, nous nous penchons sur les prises accessoires et leurs causes, ainsi que sur l’impact significatif qu’elles ont sur la vie marine et l’environnement. Nous explorons aussi les solutions proposées à ce problème persistant et mettons en lumière certaines des initiatives d’IFAW visant à empêcher les prises accessoires.
IFAW est une organisation mondiale qui mène des programmes consacrés à la conservation du milieu marin et au sauvetage des mammifères marins. L’une de nos principales priorités est de protéger la vie marine, notamment les baleines, les dauphins et les tortues marines, contre des menaces telles que les prises accessoires.
Qu’est-ce qu’une prise accessoire ?
Les prises accessoires sont un terme souvent utilisé dans le domaine de la conservation marine et désignent les animaux marins capturés involontairement ou enchevêtrés dans les dispositifs de pêche commerciale, notamment les filets maillants, les chaluts à crevettes et les palangres. Ce ne sont pas eux qui sont visés, mais ils sont accidentellement capturés par ces pratiques de pêche non sélectives.
Les prises accessoires affectent un grand nombre d’animaux aquatiques, notamment les phoques, les dauphins, les baleines, les requins, les tortues marines, les oiseaux de mer et les populations de poissons vulnérables.
Pourquoi les prises accessoires sont-elles dangereuses pour la faune marine ?
Les animaux victimes de captures accessoires sont souvent gravement blessés et risquent de mourir de leurs blessures.
Lorsque des animaux marins sont entraînés à la surface par des dispositifs de pêche commerciale, le changement rapide de la pression de l’eau peut entraîner la rupture de leurs organes internes. S’ils sont sortis de l’eau, ils risquent de mourir sur le pont du bateau par manque d’oxygène. À l’inverse, s’ils sont piégés trop longtemps sous l’eau dans des filets de pêche, ils risquent de mourir d’épuisement ou de faim. Lorsqu’ils luttent pour se libérer, les dispositifs peuvent endommager et perforer leur peau, entraînant des blessures, voire des mutilations.
Les pêcheurs rejettent souvent les prises accessoires à la mer, mais le stress et l’épuisement que subissent ces animaux après cette expérience traumatisante peuvent avoir un impact dévastateur sur leurs chances de survie face aux prédateurs et aux maladies. Il y a également de fortes chances qu’ils meurent des suites de leurs blessures sévères.
Quels sont les animaux victimes des prises accessoires ?
Chaque année, de nombreux animaux marins, des baleines aux requins en passant par les jeunes poissons et les oiseaux de mer, sont victimes des prises accessoires. Les cétacés, les tortues marines, le corail, les albatros et les requins figurent parmi les espèces et les groupes les plus touchés.
Les cétacés
Groupe de mammifères marins, les cétacés regroupent notamment les dauphins, les marsouins et les baleines. Ces animaux se retrouvent régulièrement enchevêtrés dans les filets de pêche. Selon une étude de 2020, quatre millions de cétacés, pour la plupart des dauphins, ont été victimes de prises accessoires au cours des dernières décennies dans le seul océan Indien, avec une chute du nombre de dauphins jusqu’à 80 %, conséquence directe de la pêche commerciale.
C’est la même chose dans le golfe de Gascogne, en France, un endroit connu pour les captures accidentelles de dauphins. Plus de 1 200 dauphins échoués ont été retrouvés morts dans la région entre janvier et mars 2019. Et le pire, c’est que ce chiffre n’est que la partie visible de l’iceberg. Seuls 10 à 20 % des dauphins capturés s’échouent, les 80 à 90 % restants se noient et coulent au fond de l’océan. Cela signifie que le taux de mortalité réel des dauphins dans le golfe de Gascogne pour l’hiver 2019 est probablement supérieur à 10 000. Avec le soutien de la Dutch Postcode Lottery, IFAW tente de résoudre ce problème. Vous pouvez d'ailleurs signer notre pétition pour demander au gouvernement de mettre en place les recommandations scientifiques de la CBI pour protéger les dauphins en France.
L’enchevêtrement dans des dispositifs de pêche est l’une des plus grandes menaces qui pèsent sur la baleine franche de l’Atlantique nord, gravement menacée d’extinction, et pourrait bien entraîner son extinction. Pour ces baleines, ces enchevêtrements provoquent généralement une mort lente et douloureuse, que ce soit de faim, de lacérations infectées, d’une vulnérabilité accrue aux maladies, d’un stress extrême ou de noyade. Le stress et la douleur physique résultant de l’enchevêtrement peuvent également avoir un impact sur leur inclination et leur capacité à s’accoupler. Comme il ne reste qu’environ 350 individus, si une seule femelle reproductrice est victime d’une prise accessoire, cela a un impact considérable sur le succès potentiel de la saison de naissances suivante et sur la survie de l’espèce.
Les prises accessoires ont également eu de graves répercussions sur les vaquitas, une espèce de marsouin gravement menacée. La pêche illégale a fait chuter la population actuelle de vaquita à seulement 18 individus adultes, et l’on craint que l’ensemble de l’espèce ne disparaisse si cette pratique se poursuit.
Les tortues marines
Les prises accessoires constituent l’une des menaces les plus graves pour les populations de tortues marines. Ces reptiles marins adorent chercher leur nourriture au fond de la mer, ce qui signifie qu’ils sont souvent pris au piège dans les grands filets traînés au fond de l’océan par les pêcheurs qui pratiquent le « chalutage de fond » à la recherche de crevettes et de langoustines.
Les populations de caouannes et de tortues luths, déjà inscrites sur la liste des espèces vulnérables de l’UICN, sont encore plus menacées par les pratiques de pêche à la palangre. Ces tortues se noient lorsque les hameçons des palangres se prennent dans leur bouche, leurs nageoires ou leur cou, ou lorsqu’elles les avalent, ce qui peut souvent s’avérer fatal.
Le corail
Les récifs coralliens sont également vulnérables aux prises accessoires du chalutage de fond. Cette pratique qui consiste à traîner d’énormes filets sur le fond de l’océan peut briser, arracher ou écraser les structures coralliennes, et les filets rejetés se retrouvent souvent emmêlés autour du corail, représentant une menace pour tous les animaux marins qui tentent de s’en approcher. Ces centres de biodiversité essentiels et florissants se transforment alors en des paysages gris et arides, incapables d’accueillir la vie marine.
Les albatros
Quand les oiseaux de mer descendent en piqué ou plongent sous l’eau pour se nourrir, ils se retrouvent souvent pris dans les hameçons utilisés pour la pêche à la palangre ou piégés par les filets, avant de se noyer sous la surface. Plus de 320 000 oiseaux de mer se noient chaque année à cause de cette menace, dont environ 100 000 albatros, l’une des familles d’oiseaux de mer les plus menacées.
Les requins
En matière de prises accessoires, les requins comptent parmi les animaux marins les plus vulnérables. Comme ils suivent souvent les mêmes routes que les navires de pêche, ils sont particulièrement susceptibles d’être piégés dans les filets maillants ou les palangres. Les chercheurs estiment qu’environ 100 millions de requins sont tués chaque année par les pratiques de pêche. Si l’on ajoute à cela leur faible taux de reproduction, cette menace rend encore plus difficile la reconstitution des populations de requins.
Comment les prises accessoires affectent-elles l’océan ?
Les prises accessoires font partie des cinq menaces majeures pour la vie dans nos océans. Elles perturbent considérablement la biodiversité et les écosystèmes océaniques en éliminant des espèces clés qui jouent un rôle essentiel dans le maintien de l’équilibre écologique.
Le prélèvement de poissons et d’animaux marins non ciblés modifie la dynamique prédateur-proie, pouvant entraîner la surpopulation de certaines espèces et le déclin d’autres. Par exemple, l’épuisement des prédateurs supérieurs comme les requins à cause des prises accessoires peut entraîner une surabondance de leurs proies, qui à leur tour peuvent surconsommer leurs sources de nourriture, provoquant un effet domino qui perturbe l’ensemble du réseau alimentaire et entraîne la surpopulation d’espèces comme les algues dans l’environnement.
De plus, les prises accessoires peuvent provoquer le déclin d’espèces cruciales pour le maintien de l’habitat. De nombreuses espèces marines contribuent à la structure et à la fonction de leur environnement ; par exemple, certains poissons et invertébrés participent au cycle des nutriments, à la stabilisation des sédiments et à la santé des récifs coralliens.
Si on retire ces espèces de l’écosystème, ces fonctions peuvent être altérées, conduisant à une dégradation de l’habitat. Cette dégradation peut réduire la résilience des écosystèmes marins face à d’autres facteurs de stress comme le changement climatique et la pollution, amplifiant ainsi les effets négatifs sur la biodiversité des océans et la stabilité des écosystèmes.
Le danger des captures non-intentionnelles en France
Dans les eaux du golfe de Gascogne, au large des côtes françaises, les dauphins communs se nourrissent des mêmes poissons que ceux ciblés par les pêcheurs. Tous les ans, entre janvier et mars et entre juillet et août, la distribution et l'abondance des poissons favorisent les interactions entre les dauphins qui se nourrissent et les activités de pêche intenses dans le golfe de Gascogne. Un grand nombre de dauphins est ainsi capturé non-intentionnellement dans le matériel de pêche utilisé par les pêcheries.
Les dauphins se retrouvent ainsi pris dans les filets, les cordes ou les lignes, et meurent sans pouvoir remonter à la surface pour respirer. Selon les estimations scientifiques, plus de 100 000 dauphins ont été tués par capture depuis 1990 dans le golfe de Gascogne.
Au sein de l'Union européenne (UE), tous les cétacés sont strictement protégés par la directive « Habitats ». Malgré cela, les captures de cétacés dans les eaux européennes ont atteint des niveaux records ces dernières années.
Sur le long terme, de récentes études indiquent que la viabilité de cette population de dauphins communs est fortement menacée et qu’au rythme de captures actuel, en augmentation, il existe un risque d’extinction.
Des mesures de conservation efficaces doivent être prises pour empêcher que cela ne se produise. Signez notre pétition pour demander au gouvernement de mettre en place les recommandations scientifiques de la CBI pour protéger les dauphins en France.
Comment éviter les prises accessoires ?
Pour éviter les prises accessoires, il faut adopter d’autres dispositifs et pratiques de pêche, des mesures réglementaires plus strictes et des stratégies de gestion écosystémique. Parmi les exemples d’engins de pêche alternatifs, il y a les dispositifs d’exclusion des tortues (TED), qui permettent aux tortues de mer d’échapper aux chaluts à crevettes, et les hameçons circulaires au lieu des hameçons en crochet pour la pêche à la palangre, qui réduisent la capture d’espèces non ciblées comme les oiseaux de mer et les requins.
L’une des propositions d’IFAW pour réduire les prises accessoires de dauphins dans le golfe de Gascogne est l’utilisation de dispositifs alternatifs tels que les lignes à main au lieu des filets maillants. IFAW soutient également un autre type de dispositif de pêche : les dispositifs de pêche au homard et au crabe à la demande, qui éliminent les lignes de bouées verticales fixes qui empêchent si souvent les baleines de s’échapper.
La pose nocturne de lignes est l’une des trois méthodes d’atténuation des prises accessoires destinées à protéger les albatros, qui ne se nourrissent que le jour. Néanmoins, un contrôle indépendant des prises accessoires est également nécessaire pour garantir le respect de la réglementation, d’autant plus que les images satellites recueillies dans le cadre d’une étude réalisée en 2019 ont montré que seuls 15 % des navires de pêche industrielle faisaient de la pose nocturne.
IFAW reconnaît qu’il est beaucoup plus probable de voir une réduction des prises accessoires si ces pratiques alternatives sont appliquées dans le cadre de mesures de réglementation et de gestion, par exemple en établissant des limites de prises accessoires, en créant des aires marines protégées (AMP) et en instaurant des fermetures saisonnières dans des habitats clés.
Avec une surveillance efficace, un respect des règles et une collaboration avec le secteur de la pêche, il est possible d’atténuer considérablement l’impact des prises accessoires sur la biodiversité et les écosystèmes marins.
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